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Sous un titre un brin provocateur, je souhaiterais mettre à jour quelques unes de mes réflexions sur le système prostitutionnel.

J’aimerais d’abord préciser un point : je ne suis pas, ni n’a été prostituée (1). Et, bien que ce qui soit le plus important dans la prostitution, ce vers qui on doit concentrer tous nos efforts sont les personnes prostituées, je ne veux pas parler d’elles aujourd’hui. Je veux parler des prostitueurs. Les prostitueurs sont les hommes (2) qui achètent un acte sexuel auprès d’une ou plusieurs personnes, femmes, hommes, adultes, enfants.

Et j’applique, à ces hommes, mon raisonnement sur les violences sexuelles. Celui-ci est basé sur ce qu’on peut appeler la stratégie ou le comportement de l’agresseur. C’est ce point qui définit s’il y a violence (et non pas le comportement de la victime) (3).

Ainsi, je considère le comportement du prostitueur comme intrinsèquement violent. Pourquoi ?

Le prostitueur est égoïste. Il a recours à la prostitution car il souhaite obtenir quelque chose, pour lui. Pour qui d’autre ? Pour aider financièrement les personnes prostituées ? Si c’était le cas, il leur donnerait de l’argent sans rien demander en retour. Mais non, il ne pense qu’à lui, son plaisir, ses envies, ses « besoins » en ayant en tête toute sorte de justification : j’ai des besoins sexuels, personne ne veut coucher avec moi, ces femmes sont là pour ça, si elles sont là c’est parce qu’elles le veulent…

Certains vont se persuader qu’ils sont « gentils » : je fais que ce dont elle a envie, je veux qu’elle prenne du plaisir, je la laisse faire ce qu’elle veut, je lui parle, je ne la frappe pas, je lui demande son âge et si elle est prisonnière d’un réseau…

Il faut être assez stupide pour croire que les personnes prostituées vous diront qu’elles sont sous la contrainte d’un réseau ou qu’elles sont mineures, qu’elles n’aiment pas ce qu’elles font, qu’elles veulent fuir. Ça peut arriver, j’en suis sûre ; je suis même persuadée que ça peut se voir, se ressentir. Et dans ces cas-là, croyez-vous que ces « gentils » prostitueurs rebrousseront chemin ? Je suis persuadée qu’ils veulent simplement se donner bonne conscience. « Tant qu’elle acquiesce, c’est bon, elle consent, je peux faire ce que je veux ».

Mais ce que ces « gentils » ne veulent pas admettre, c’est qu’ils ont un point commun avec les « méchants », qu’ils ont un point commun avec tous les violeurs. Aucun d’entre eux ne sont dans une relation humaine. Ils ne sont pas dans un échange avec un être humain. Ils n’ont que faire de ses désirs, ses envies et surtout, ses non-envies. Ils n’ont que faire de sa vie, pourquoi elle est là, qu’est-ce qu’elle veut, qu’est-ce qu’elle aime, de quoi elle rêve, de quoi elle a peur… A leurs yeux, consciemment ou non, la prostituée n’est pas une personne à part entière. Ils ne l’ont pas rencontrée , ils l’ont choisie, ils l’ont sélectionnée. Ils la choisissent grande, petite ou brune. S’ils n’ont pas de critères physiques, ils auront toujours le critère de la prostituée : ils choisissent une prostituée, car elle est là pour ça.

Donc, soit le prostitueur sélectionne concrètement sa marchandise et l’évalue tel un objet de consommation et dans ce cas, il nie totalement l’humanité de la personne prostituée. Soit, il prend n’importe laquelle, mais une prostituée tout de même, et alors, il nie aussi son humanité car il y a les femmes, celles à qui on ne demande pas, et les prostituées, celle à qui on peut (4). Car les femmes, on peut les respecter, elles ont des envies. Mais les prostituées, elles n’en ont pas. Ou bien, elles ont toujours envie ? Si le prostitueur pense qu’elles n’ont pas d’envies, alors il les viole car elles n’ont pas envie. Et peut-on sincèrement croire que des milliers (millions) de femmes se tournent vers la prostitution car elles ont une libido tellement débordante qu’elles veulent toujours, tout le temps, avec n’importe qui, n’importe où, n’importe comment ?

La sexualité (si on peut l’appeler ainsi…) des prostitueurs est profondément égoïste et violente. Elle ne tourne qu’autour d’eux et est combiné avec le principe de libre disposition du corps des femmes. C’est cette vision qui fait de lui un violeur à très fort potentiel. Et le fait que, concrètement, il ne soit pas un violeur dépend des personnes qu’il a en face de lui, d’une histoire de coup de bol. Mais sa sexualité restera la même. Il a une sexualité de violeur. Et s’il a cette vision de la sexualité envers certains êtres humains, pourquoi cela n’affecterait-il pas les autres êtres humains? Pourquoi sa sexualité serait différente avec les « autres« , avec les femmes ? Comment pourrait-on faire une distinction entre les femmes d’un côté et les prostituées de l’autre sans nier l’humanité de toutes les femmes ?

Tous les prostitueurs sont des violeurs.

prostitueur = violeur

(1) Je me suis posée la question sur la meilleure des façons d’écrire ceci. J’ai préféré utiliser l’expression « être prostituée » plutôt qu’ « être une prostituée » car la première me semble plus relever d’une action et la seconde d’un rôle, un statut, une étiquette (comme si les femmes prostituées n’étaient définies que par ça).

(2) Il serait assez hypocrite de cacher cette réalité sociale. 99% des prostitueurs sont des hommes.

(3) Voir sur mon blog : Qu’est-ce qu’un viol ? & La stratégie de l’agresseur

(4) Mise à jour : on me fait remarquer très justement l’ambiguïté de ces propos. J’essayais de retransmettre ce que traduisent les agissements et les pensées des prostitueurs : ils font la distinction femmes (respectables)/prostituées (de l’ordre des sous-femmes ? donc qui ne font pas pleinement partie de l’humanité). Et je suis absolument écœurée par cette façon de penser. C’est cette façon de voir qui est déshumanisante. Pour que ce soit plus clair, j’ai mis en italique les mots « femmes » et « prostituées » quand il étaient utilisés dans le sens que leur donnent les prostitueurs.

Une lutte sans fin

J’ai pas emmené mon carnet. J’ai du penser que je n’en aurais pas besoin. J’ai du me dire que j’allais passer ma « nouvelle vie » à m’amuser. Et que tout irait bien.

Au fond, j’avais sûrement pas tort. En partant, je me suis éloignée de certains éléments toxiques, de certaines angoisses, la peur de retomber sur des gens, la peur qu’ils me renvoient à ce passé, et ce truc désagréable, inconfortable que je ressens quand je revois certaines personnes en imaginant très bien qu’ils me prennent pour une tarée, une fille dangereuse, une menteuse.

J’ai pas tout ça ici. Et au final, même l’environnement dans lequel je suis m’incite à être plus confiante, plus sûre de moi. Assez rapidement, je suis devenue très proche d’une fille, une amie. J’ai l’impression de rencontrer beaucoup plus de féministes. Malgré ma timidité, j’ai quand même mon rendez-vous hebdomadaire où j’écoute pleins de gens discuter du féminisme, du racisme, de la transphobie… Je rencontre ces gens motivées, en colère, solidaires, joyeuses. Ça fait du bien!

Et toute cette assurance, j’ai pas envie de la lâcher. Je ne m’imagine pas le faire. Je vois pas comment. Quand une dizaine de garçons viennent me réveiller, dans une chambre, seule avec eux, et qu’ils essayent de m’intimider, de me faire peur, de rire de moi, de jouer avec moi, je lâche pas le morceau, j’ai pas peur, je ne joue pas. Et c’était même assez facile en fait, sûrement parce que j’avais deviné avant ce qui allait se passer. Au final, j’étais fière de moi, j’ai changé et ça on ne me l’enlèvera pas.

Et puis il y a ces moments, sans savoir vraiment d’où ils sortent, où t’as pas la force. Où tout ça te déprime. T’as tes souvenirs et t’as aussi ceux des autrEs. Et tu te demandes comment on va s’en sortir. Tu te demandes si un jour, plus rien ne nous menacera, si on pourra arrêter d’être sur nos gardes. Si on sera là aussi, les unes pour les autres. Si on arrivera à s’entraider, s’il ne sera pas trop tard, encore une fois.

Je n’ai plus l’impression d’avoir peur de mon passé, mais parfois le futur m’effraie. Et si on trahissait ma confiance ? Et si je me trahissais moi-même ? Comment je pourrais alors me supporter ? Car si, malgré les solutions que j’ai aujourd’hui, j’en suis quand même arriver à ça, ça voudrait dire que ces solutions ne marchent pas. Il me restera quoi alors pour m’en sortir ?

Alors du coup, je me dis que je dois rester sur mes gardes. Mais j’en ai marre d’avoir à me défendre. C’est épuisant, j’ai pas envie de passer toute ma vie dans cet état. J’aimerais être sûre que plus personne n’aura les moyens et l’intention de m’agresser. J’aimerais vivre en paix.

La rue c’est chouette !

Tiens, j’ai envie de parler d’un truc joyeux aujourd’hui parce que je m’en rends compte presque tous les jours et ça change des trucs glauques, pas drôles, déprimants. Cela fait quelques mois que je me balade dans les rues, le jour, la nuit, seule ou non, sans que je sois victime de harcèlement de rue. Jamais.

Quand je croise un ou plusieurs hommes le soir, je ne suis plus sur mes gardes et l’idée qu’ils m’abordent ne me vient même plus à l’esprit.
Quand un homme vient me parler, mon premier réflexe est de penser que ce n’est pas innocent, qu’il vient me parler parce que je suis une femme. Et après quelques échanges, je me rend compte que non. Du coup, oui, je peux continuer la conversation en étant bien plus à l’aise. Je ne sais pas réellement comment je sais que c’est innocent, je le sens juste. C’est peut-être dans le regard, dans la façon dont on me parle, voire même dans les sujets abordés.
J’ai encore cette appréhension quand je vois un homme debout dans la rue, au pied d’une porte, à fumer, à attendre ou à parler avec des amis, qu’il me regarde comme un morceau de viande. Et quand je passe, rien.
Et je vous assure que ça, ça met de bonne humeur !

J’ai encore du mal à m’y habituer, c’est dire l’ampleur de ce que peut être le harcèlement de rue au quotidien. Le sexisme, le harcèlement et les violences sont ailleurs, sans aucun doute, mais dans la rue ils semblent absents. Par contre, j’en ignore totalement les raisons. Est-ce le fait d’une grande ville où il y a tellement de monde que tout le monde s’ignore ? Est-ce le fait de l’extrême politesse apparente du pays ? Ou y a-t-il eu une réflexion sur le harcèlement, la rue et les genres ? Ou autre chose, je ne sais pas. Mais ça me fait des vacances !

En visitant un musée, j’ai eu la joie de tomber sur ces deux magnifiques objets. Ils datent du 16 et 17ème siècles. Ce sont des instruments de torture destinés aux femmes particulièrement.

Allemagne, 17e s.

« Scold’s bridle » exposé au Kelvingrove Art Gallery and Museum, Glasgow.

Cet objet, appelé « Scold’s bridle », était utilisé contre les personnes qui troublaient l’ordre public, harcelaient leurs voisins ou alimentaient des rumeurs. En réalité, il était surtout destiné aux femmes. Cet objet qui recouvre toute la tête, pèse 1 kg. Des bords métalliques dentelés s’encastraient dans les joues ce qui empêchait la victime de parler.

"Brank" exposé au Kelvingrove Art Gallery and Museum, Glasgow.

« Brank » exposé au Kelvingrove Art Gallery and Museum, Glasgow.

Le second objet avait la même fonction, celle de « brider » les femmes. Il était porté autour du cou. On voit très bien les deux pointes de fer qui menaçaient la gorge de la victime. La chaîne servait à traîner la femme jusqu’à un endroit public pour l’humilier.

En plus du caractère humiliant de ces objets, ils avaient surtout pour but d’empêcher les femmes de parler. On retrouve ici un cliché, donc très ancien, de la femme bavarde et mesquine dont les paroles nuisent aux autres, à leur tranquillité et leur réputation.

Tribune

L’intégralité de cette tribune peut être téléchargée ici. Toute personne adhérant à cet appel peut le reprendre à son compte et le reproduire, le diffuser et le publier. Par ailleurs une pétition est en ligne ici.

 

 

Incitation au viol sur un site de coaching en séduction

 

 

Nous, militantes féministes et citoyennes, avons récemment dénoncé un site de coaching en « séduction » appelé Seduction By Kamal
(1) comme incitant au viol.

Seduction By Kamal est un site d’apprentissage des techniques de « pick up artist », à savoir « artiste de la drague ». Il s’agit de techniques de « drague » et de conseils en matière de sexualité. Le site est gérée par la société SBK Coaching, et génère du profit grâce à la vente de livres numériques (« e-books »).

L’indignation s’est focalisée sur un article violent en accès libre et gratuit. Intitulé « Comment Bien Baiser : les 3 Secrets du Hard SEXE » (2), il nous apparait en réalité comme une incitation au viol, particulièrement toxique en raison de l’aspect éducatif du site.

Nous estimons que les propos sont explicites : pour bien « baiser », l’important est de ne pas tenir compte du consentement de sa « partenaire ». Une capture d’écran est conservée ici. Les extraits les plus choquants sont cités ci-dessous, dans la lettre au Procureur, ainsi que chez la blogueuse Diké (3).

Cet article a été écrit par Jean-Baptiste Marsille, rédacteur web, auto-entrepreneur et écrivain (4). Le directeur de publication du site se fait appeler Kamal (5).

Il ne s’agit pas d’un petit blog isolé. D’après son créateur, ce site reçoit 20 000 visiteurs par jours, le chiffre d’affaire de la société «
SBK Coaching» est de l’ordre de 10 000 euros par mois (6). Sa page Facebook est suivie (« likée ») par près de 17 000 personnes. Nous notons aussi que les frais de fonctionnement du site semblent peu élevés, compte-tenu des avantages fiscaux de la Pologne par
rapport à la France (7), et du caractère dématérialisé des publications électroniques vendues.

Malgré de multiples sollicitations depuis octobre 2012, Kamal n’a jamais réagi. L’article était toujours en ligne à l’heure où nous écrivons cette lettre.

Depuis 2012, cet article a également été signalé en vain au Ministère de l’Intérieur (www.internet-signalement.gouv.fr). Pourquoi la loi n’est-elle pas appliquée ? Est-ce un problème managérial (manque de moyens pour traiter tous les signalements) ou un problème culturel (mauvaise formation et sensibilisation des agents du Ministère à la misogynie en ligne et à la culture du viol) ?
Nous joignons donc à cette tribune une plainte au Procureur de la République concernant le délit d’incitation au viol en ligne sur la page signalée.

 

 

Appel aux autorités et aux acteurs du web : stopper la misogynie en ligne

 

 

Ceci dit, notre objectif n’est pas de nous focaliser sur ce seul type de site Internet à la marge, mais sur l’ensemble de la misogynie globalement répandue sur l’espace Internet, et trop tolérée.

De nombreux agresseurs et leurs complices se sentent autorisés, en toute impunité, à exhiber sur Internet leurs infractions misogynes (viol, agression, non-assistance à personne en danger, recel de médias à caractère pédo-criminel…). Leurs victimes sont réduites au silence ou humiliées à l’échelle planétaire, subissant la reproduction perpétuelle de leurs agressions sur les réseaux sociaux.

Comment les Internautes peuvent-ils encourager un tel laxisme envers des criminels, et une telle sévérité envers les victimes ? Certainement à cause d’un amalgame toxique entre sexualité et violence érotisée (culture du viol) combinée à une mauvaise appréciation du sexisme sur Internet, perçu à tort comme “virtuel”.

Or le sexisme en ligne n’a rien de virtuel : le harcèlement subi par des personnalités connues comme par des adolescentes anonymes (ou qui auraient voulu le rester), le racolage des mineures par les pédo-criminels ou les proxénètes, l’omniprésence des images de femmes hypersexualisées et objectivées, dans les contenus personnels, journalistiques, culturels et commerciaux – clichés parfois
pris à l’insu du sujet, l’humour sexiste qui alimente la tolérance envers le sexisme, les discours vindicatifs, stéréotypés et dégradants à l’égard des femmes, tout ceci est bien réel.

Ailleurs, sur le web anglophone notamment, des voix se sont élevées pour exposer l’ampleur de la misogynie sur Internet, et exiger des actions concrètes pour y mettre fin. Ainsi la campagne #FBRape a permis un début de dialogue avec Facebook, dans le but d’améliorer les systèmes d’identification et de modération des discours de haine misogyne (8).

Côté français, l’incitation à haine, à la discrimination ou à la violence est interdite par la Loi sur la liberté de la presse, article 24 (9). Nous exigeons que l’alinéa 7 soit appliqué, à savoir que l’incitation à la violence en raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap soit réellement pénalisée.

Nous demandons également une modification de l’alinéa 6 de cette même loi (concernant l’incitation à la discrimination et à la haine) pour qu’il soit étendu au sexisme. Actuellement seules sont concernées les discriminations et la haine motivées par des raisons ethniques, raciales ou religieuses.

Enfin, nous appelons les pouvoirs publics à mettre en place une plateforme dédiée au signalement de sites misogynes, à la sensibilisation des acteurs du web sur le sujet, et à l’accompagnement des victimes de discrimination, de haine ou de violences misogynes sur Internet.

Nous appelons également les entreprises du web ou présentes sur Internet à mettre en place des pratiques éthiques pour lutter contre le sexisme sur Internet, en coopération avec la société civile.

Collectif féministe et citoyen

 

 

Plainte au Procureur

 

 

Paris, le 05/09/2013

Lettre R.A.R.

Monsieur le Procureur de la République,

Nous, citoyennes, tenons par la présente à vous signaler les faits délictueux visés par l’article 24 de la Loi sur la Liberté de la Presse qui punit de « cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ceux qui (…) auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n’aurait pas été suivie d’effet, à commettre l’une des infractions suivantes : les atteintes volontaires à la vie, les atteintes
volontaires à l’intégrité de la personne et les agressions sexuelles définies par le livre II du code pénal ».

Sur le site Seduction By Kamal, cette page (URL : http://www.seductionbykamal.com/comment-bien-baiser -captures d’écran ci-joint) intitulée « Comment Bien Baiser : les 3 Secrets du Hard SEXE » constitue une apologie du viol et une incitation à la violence contre les femmes. Quelques extraits explicites :

  • « Montrez-lui qu’elle n’a pas vraiment le choix »
  • « Attaquez sa poitrine »
  • « créer rapidement une image du mec qui sait ce qu’il veut et qui l’obtient quand il veut ».
  • « vous décidez […] tout est entre vos mains (ou vos cuisses devrais-je dire) »
  • « perdre tout contrôle de la situation est un « turn on » majeur pour les femmes ».
  • « appliquez-vous à aller en profondeur et à ne stopper la cadence que quand VOUS le décidez ! Elle se plaint ? Pas pour longtemps ! C’est un phénomène naturel de rejet de l’autorité, mais une fois cette barrière franchie, elle s’abandonnera à vous et vous demandera de la défoncer […] c’est ça en fait la véritable notion du fameux « BIEN BAISER ».
  • « Imposez votre puissance ».
  • « Donnez des ordres et soyez inflexible. Ne lui demandez pas gentiment si, éventuellement, vous pourriez avoir une fellation et éjaculer dans sa bouche… La décision est prise, retirez-vous et faites la descendre vers votre sexe afin d’affirmer votre posture. »
  • « Si seulement vous saviez combien de femmes rêvent de se faire démonter par un inconnu au chibre géant ».
  • « Cette méthode est relativement efficace quand on rencontre une inconnue qui nous ramène chez elle. Si elle en arrive là, c’est sans doute parce qu’au fond, ce qu’elle veut, c’est tirer un coup. »
  • « Ne lui demandez pas si vous pouvez la pénétrer comme un animal sauvage, faites-le ! »
  • « il vous suffit […] de laisser parler vos envies, sans vous restreindre. Prenez le contrôle du rapport sexuel et pensez que votre masculinité passe par des coups de boutoir infligés. »
  • « ne vous refusez rien ».

Nous avons signalé ce lien à internet.signalement.gouv.fr sans aucune conséquence concrète.

La présente faisant valoir ce que de droit.

 

Copie à
– Monsieur Manuel Valls, Ministre de l’Intérieur
– Madame Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits des femmes,
– Madame Christiane Taubira, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice
– Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes
– Observatoire des Inégalités
– Le Monde
– Le Figaro
– Médiapart
– Rue 89
– Libération
– Les Nouvelles News
– Slate
– Fédération Nationale Solidarité Femmes
– Signalement publié sur internet par une dizaine de blogs

le 05/09/2013

 

Capture d’écran de l’article signalé : http://dikecourrier.files.wordpress.com/2013/08/comment-bien-violer-une-femme-par-seduction-by-kamal-kay-et-jb-marsille1.pdf

 

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Sources et liens cités dans l’appel :
(1) www.seductionbykamal.com
(2) www.seductionbykamal.com/comment-bien-baiser
(3) http://dikecourrier.wordpress.com/2013/08/19/pick-up-artists-le-marketing-de-la-violence-misogyne
(4) www.profils-auto-entrepreneurs.com/profil/jean-baptiste.marsille
(5) www.seductionbykamal.com/mentions-legales/
(6) www.agence-csv.com/seduction-by-kamal-le-seducteur/
(7) www.lepetitjournal.com/varsovie/economie/132935-varsovie-eco
(8) www.womenactionmedia.org/facebookaction/how-to-report-gender-based-hate-speech-to-facebook
(9) www.legifrance.gouv.fr

In the street

photo0324

J’avais déjà abordé ce point ici : la stratégie de l’agresseur permet de définir s’il y a viol en dehors de l’analyse du ressenti et des réactions de la victime. Il s’agit de pointer la pensée, le but et les comportements de l’agresseur qui démontrent ainsi sa volonté de passer outre le désir de l’autre, sa victime. Néanmoins, le terme de « stratégie » me dérange car il implique une sorte de préméditation du crime, une sorte de perversité qui exclurait bon nombres d’agresseurs. C’est pourquoi, je préfère parler de comportement de l’agresseur. J’aimerais expliciter cette notion à travers ce que j’analyse de mon vécu ou de celui d’autres personnes.

Ainsi, je vois une première catégorie d’agresseurs. A celle-ci, j’applique volontiers le terme de « stratégie ». Ce sont, pour moi, les individus décidant consciemment de dominer autrui et qui y tirent du plaisir. L’une de mes amies m’a récemment confié un propos qu’avait tenu un ex-compagnon. Un matin, il lui a dit : « Tu as senti ? Je t’ai fait l’amour cette nuit. » Ici, il est clairement spécifié que, malgré l’emploi du mot « amour », c’est un viol où l’agresseur a utilisé le corps inconscient d’une autre personne pour son désir personnel : la victime est consciemment objétisée puisqu’elle « n’était pas là », elle n’était pas consciente et donc consentante. L’agresseur a donc parfaitement conscience de ce qu’il a fait. De plus, il en fait part à la victime. Il le dit d’une manière enrobée, mais comment ne pas y voir une seconde façon de rabaisser la victime ? Il lui dit ici qu’il a conscience de ce qu’il a fait, tout en lui faisant croire que c’était normal (« faire l’amour ») et attend sa réaction. A mon avis, il a tiré plaisir de voir la souffrance, la soumission et surtout le trouble que cela doit engendré dans l’esprit de la victime, trouble résultant de la manipulation de l’agresseur. En effet, mon amie vivait une relation abusive, violente, et l’homme en question a su instaurer un climat d’insécurité et de parfaite soumission de la victime qui n’a plus conscience de ses droits. Quand elle m’a raconté cette histoire, elle n’imaginait pas que c’était un viol, parce qu’elle n’avait rien fait, rien objecté. Mais comment le pouvait-elle ? L’agresseur avait clairement une stratégie pour abuser (pas uniquement sexuellement) quotidiennement de sa victime.

Je perçois une deuxième catégorie d’agresseurs où la domination semble moins consciente. C’est dans celle-ci que je placerais mon agresseur principal. Ce n’est que longtemps après avoir admis le viol, longtemps après avoir tout décortiqué, que j’ai réalisé que mon agresseur avait également une « stratégie ». Il m’est venu à l’esprit que mon agresseur avait envie de « baiser ». Peu importe avec qui et comment, ce qu’il voulait, c’était baiser. Alors, oui, il a eu un comportement d’agresseur en faisant fi de mes maigres protestations, mais là où je vois le véritable agresseur, c’est dans son égoïsme. C’est cet égoïsme-là, la prise en compte de son seul désir, sans prendre en considération la personne en face, qui l’a poussé au viol. Je ne parle pas ici de pulsions sexuelles (qui n’existent pas), juste d’une image de la sexualité tellement centrée sur son désir et incluant la libre disposition du corps des femmes qu’elle est violente en soi. La sexualité de cet individu est violente. J’étais là, c’était pas de bol pour moi. Y aurait-il eu une autre fille, une fille désirant cette relation, il n’y aurait peut-être pas eu de viol mais sa sexualité à lui resterait tout aussi violente.

Je ne me veux pas exhaustive et aucune pensée n’est aboutie, mais je pense que la plupart des viols correspondent à l’une de ces catégories. C’est en tout cas ainsi que je voyais les choses jusqu’à être confrontée à d’autres types de « rapports sexuels » que je définis également comme violents. J’ai trois cas en tête : celui d’une jeune fille de 16 ans, saoule, entamant d’elle-même une fellation à un jeune homme plus âgé de quelques années et qui porte plainte pour viol peu après ; celui d’une autre jeune fille ayant également pratiqué une fellation à son (premier) copain parce qu’elle pensait que c’était ainsi qu’elle devait se comporter ; et enfin, mon propre cas où, n’ayant aucune sexualité car totalement déconnectée de mon corps, j’ai consciemment provoqué des rapports sexuels afin d’être « normale ». Pour les deux premiers cas, je n’ai pas plus d’informations que celles données ici. Peut-être qu’avec plus d’informations, on pourrait établir une « stratégie » de l’agresseur : l’homme avait-il demandé, insisté, laissé entendre que la fille devait lui faire une fellation ? Mais même sans cela, dans ces trois cas, j’y vois deux choses. La première est la pression sociale que subissent les femmes pour être sexuellement disponibles : « je dois faire ça », « on attend ça de moi », « sans ça, je suis anormale/coincée/autre ». Et ceci me cause un problème : comment avoir une sexualité libre si on se sent obligé-e de dire oui ? Si, ce qui pèse dans la balance n’est pas seulement notre envie mais aussi cette sensation du « devoir » ? La seconde chose qui me pose problème est la responsabilité du partenaire sexuel. Compte-tenu de sa position dominante (d’homme sur femme), ne devrait-il pas s’assurer du consentement enthousiaste de sa partenaire ? Ne doit-il pas tenter d’annuler la pression que la société fait peser sur les femmes par un comportement responsable ? Et, si on part de cette idée, qu’en est-il de sa responsabilité dans un rapport qui a dégouté la femme ? Pour ces femmes, sans que cela soit considéré comme un viol, elles ont vécu leur expérience comme une violence : une relation sexuelle n’est pas censée vous dégouter, vous dégouter de vous-même.  Alors, peut-on considérer qu’il existe des viols sans violeur ?

ça va, ça vient

Des fois, le monde nous joue des tours. Le 10 février, j’avais décidé de marquer ce jour-là d’une pierre blanche. C’était le jour où j’avais eu un déclic, où je m’étais réconciliée avec moi-même. Bon bien sûr, j’avais encore beaucoup de travail à faire sur moi-même, mais j’avais senti que j’avais fait un grand pas en avant ce jour-là. Un an après, je ne tourne plus en rond, mais je suis dans cette période de bas. Le truc qui vous prend comme ça, tu te demandes pourquoi, t’as peur de replonger, t’essayes de trouver une solution.

J’en ai eu d’autres des périodes de bas. Elles sont passées, alors celle-ci aussi passera.

Des fois, le hasard de mes réflexions vont m’amener à ces jours où il n’y avait pas grand chose de bon pour moi. Je m’y ballade presque avec sérénité. Des fois, j’y trouve des informations, j’apprends quelques chose, je comprend un truc. Et j’encaisse. Les choses restent logiques, voire deviennent encore plus logiques. Rien ne bouleverse mes certitudes, mais ça met toujours un peu de temps à passer. J’imagine que c’est le temps d’assimiler l’information.

Mais ce n’est pas dangereux, ça ne me fait pas mal, je ne me sens jamais coupable de ce que j’apprends, je n’en ai pas non plus honte. Au pire, je me dis que j’étais un peu bête de pas l’avoir réalisé plus tôt. Mais au fond, tout ça ne change rien. Alors j’ai un peu de mal à comprendre pourquoi ça ne va pas dans ces cas-là.

Il y a quelques jours, je me suis souvenue et j’ai compris qu’il y avait un deuxième type. Je me suis réveillée après avoir ressenti une douleur, comme si on m’appuyait dessus. Et il était là, nu comme un vers, à déguerpir à quatre pattes au moment où j’ai ouvert les yeux. La seule explication que j’ai eu le lendemain, c’était à propos d’un radiateur. Je n’étais pas convaincue et je ne voulais certainement pas savoir ce qu’il foutait là. Aujourd’hui, je ne sais toujours pas pourquoi il était là : est-ce qu’il m’a touchée (j’en doute) ? est-ce qu’il s’est masturbé à côté de moi ? ou est-ce qu’il m’a « juste » regardée ? Je n’en sais strictement rien et même si mes souvenirs étaient nets, je n’en saurais pas plus parce qu’il me semble avoir été dans l’incompréhension totale au moment où je me suis réveillée. Quand je me suis rappelée de cette scène, après un petit choc, la colère (que je chérie particulièrement) est vite montée et je voulais savoir. Sûrement, histoire d’être sûre de la raison qui me faisait détestait ce type, être sûre de ce que j’ai à lui reprocher. Aujourd’hui, je ne suis pas certaine de vouloir le savoir. Ce que je sais, c’est que ce n’était pas normal, il n’avait pas à être là et c’est le principal. Le reste finalement, ce sont des détails.

Alors bon, qu’est-ce que ça change ? Un évènement à digérer, je pense, mais au fond, rien ne change. Tout est à la bonne place, je le déteste, ce n’est pas de ma faute. Je suis presque énervée de voir mon corps ne pas suivre ce raisonnement, ça m’agace, ça m’enfonce et je sais pas quoi faire. A chaque fois, j’en arrive à cette même conclusion: ON S’EN FOUT! Alors, vite, je veux que ça aille vite.

Et puis, je me retourne vers cette colère, mais en fait non. J’ai pas envie ; oh, juste assez pour éviter de tomber dans la culpabilisation « je suis faible, je contrôle pas mon corps » qui est facilement balayée par un « c’est de leur faute si je suis comme ça ». Donc voilà Mme Colère et ma petite liste de personnes à détester. Je l’ai écrite l’autre jour, ceux qui ont usé de mon corps d’une manière ou d’une autre : il y en a 6. Je les déteste pas tous d’ailleurs, ou du moins pas tous de la même façon.

Finalement mon problème, c’est peut-être parce que je garde tout ça pour moi. Comme avant, comme à l’époque où j’ai créé ce blog histoire d’avoir un endroit où évacuer le trop plein. Parce que je me dis, quand même, 6 ! On me prendrait pour une cas soc’. Même si je n’ai pas honte de moi, je reste assez méfiante de ce qu’on pourrait penser de moi. Moi toute seule, je gère mes problèmes, mais j’aurais honte de les partager. Et puis, à quoi ça sert ? Que peuvent-ils faire ? Rien, tout est réglé dans ma tête. Et ça tourne en rond, toujours, dès que je veux faire rentrer quelqu’un dans ma vie, dans cette vie-là.

C’est quoi la première fois?

Il semble que, dans notre société, la première relation sexuelle se produit quand le pénis « rentre » dans le vagin. Cela semble être la définition de base. Mais y a-t-il une certaine « profondeur » à respecter qui caractériserait la « première fois » ? Est-ce que la déchirure de l’hymen en est l’objectif ? Ou bien faut-il qu’il y ait éjaculation pour que ça compte ?

Tout ceci me semble bien rigide, bien technique : comment démonter par A + B que monsieur-madame a perdu sa virginité. Je n’aime pas cette définition.

Tout d’abord, c’est une vision très hétérocentrée. Je ne sais pas trop ce que la société pense des relations homosexuelles masculines : celles-ci devant se résumer à pénis-dans-anus ou pénis-dans-bouche, je me pose la question de savoir si Elle pense que celui qui « se fait pénétrer »* est toujours vierge parce que lui n’a pas mis son pénis-dans-quelquechose. Et que pense-t-Elle des relations lesbiennes ? Sans pénis, pas de relation sexuelle. Les Lesbiennes sont de vraies Vierges (je ris à l’idée que des catholiques doivent comparer les lesbiennes à leur vierge Marie).

Ensuite, il y a cette histoire d’hymen. On sait maintenant (et il y a 4000 ans, on le savait aussi) que toutes les femmes n’ont pas d’hymen, que celui-ci ne se déchire pas dès la première pénétration ou que la femme ne saigne pas toujours. Bref, la perte de la virginité, pour une femme, ne se résume pas à une caractéristique physique.

J’avais posé la question de l’éjaculation juste pour la rhétorique puisque je doute qu’elle entre en jeu dans la définition de la « première fois ». Mais elle est importante puisqu’elle rejoint la question de la reproduction. Je pense que c’est autour de cette dernière que la virginité se définit.

Aujourd’hui la virginité n’a pas grande importance. Mais dans une société où la filiation prend une grande place, la virginité des femmes en a une également. Elle n’a pas nécessairement de valeur morale mais une valeur technique/juridique. Si une femme est vierge, au sens de pas-de-pénis-dans-vagin, alors elle ne risque pas d’enfanter. Donc, chaque homme (monde patriarcal, quand tu nous tiens) est assuré que sa progéniture est la sienne si tant est que son épouse ne commette pas d’adultère (qui est exclusivement féminin dans certaines sociétés). La notion de virginité serait donc intimement liée à la capacité reproductive : ce qui n’a aucun sens aujourd’hui, ici, maintenant (oups, je prends la pilule, je ne peux être que vierge).

Ceci expliquant cela, je dis crotte à ceux qui parlent de « première fois ». Je pense plutôt que chacun a sa propre définition de la première fois parce que chacun a sa propre définition de la sexualité. Moi toute seule, j’ai vécu ma première fois ; ou bien je n’étais pas toute seule, mais personne n’a touché l’autre ; ou bien juste un peu ; ou beaucoup ; pleins de choses différentes ; ou rien du tout ; à 1, à 2 ou plus, avec n’importe qui. Chacun-e donne l’importance qu’il-elle veut à ses expériences sexuelles. Tant que ça compte pour lui-elle, alors ça compte ; si ça compte pas, ça compte pas.

J’ai couché avec pleins de garçons avant de vivre ma première fois.

*Je mets cette expression entre guillemets parce qu’elle est grammaticalement lourde de sens patriarcal, donc fausse. 🙂

Revivre après un viol

Intervention du Dr. M. Salmona (dailymotion)

Voici une vidéo, toujours aussi précieuse, de Muriel Salmona. Si vous souhaitez comprendre les mécanismes qui se mettent en place suite à un viol, prenez ces quelques minutes de votre temps.

J’ai été émue d’entendre des phrases qui m’ont fait tilt pour les avoir déjà pensées ou ressenties : « remettre les choses à l’endroit » ou encore « reprendre dans ses bras » celle qu’on était à ce moment-là. Toutes ces petites choses qui me font dire que je pense bien les choses : elles sont bien à l’endroit dans ma tête.